Comme beaucoup l'auront remarqué, la route Brassard recèle une quantité très importante de propriétaires de chevaux. Plusieurs terrains relativement vastes sont équipés d'écuries et d'enclos pour le bien-être des chevaux d'équitation. Donald Bouchard, lui, n'a pas de canasson mais aime bien jouer au «gentleman farmer». En plus de ses poules, il élève un veau dont il prend un soin jaloux. Dernièrement il devait s'absenter quelques jours pour cause de voyage. À qui confier la basse-cour et le veau? Après 5 secondes de réflexion le nom de son fils Mario s'imposa comme une évidence d'autant plus qu'il reste à quelques maisons de chez lui. En bon garçon Mario accepta de prendre la relève. Après un briefing de courte durée sur les besoins alimentaires des animaux (quantité, fréquence, genre de moulée etc…) et sur leurs habitudes de vie et soins spécifiques, Mario se sentait totalement en confiance et Donald rassuré. Le premier matin du contrat, Mario se pointe très tôt, à l'heure des poules en fait, pour s'acquitter de ses fonctions avant d'aller travailler. Pas de problème côté volailles mais alerte maximale côté veau. En effet il n'était plus dans son enclos. Il avait sauté la clôture et s'était fait la malle en se réfugiant dans le bois. Mario, totalement déconcerté, s'enfonça dans la forêt à la recherche du fugitif, mais ne le trouva pas. Comme il n'avait pas beaucoup de temps pour une fouille plus poussée, il se dit qu'il reviendrait sûrement de lui-même pour manger. Il ouvrit l'enclos donc et y déposa une copieuse portion de moulée. Puis il partit pour l'école (polyvalente de Jonquière). Toute la journée il se fit du mauvais sang en pensant à l'évadé. De retour à la maison vers 16h30, il sauta dans ses bottes de cultivateur et fit un bond chez papa. Bonne nouvelle, le veau était de retour. Malheureusement, dès que Mario tentait de s'en approcher pour fermer l'enclos le veau, de nature plutôt craintive, se sauvait. Faux dire qu'il n'était pas familier avec ce nouveau soigneur qu'il connaissait à peine. Donald ne lui avait jamais parlé de son fils. Qu'à cela ne tienne, Mario lui remis de la moulée et, après bien des tentatives de rapprochement avec la race bovine, toutes avortées, il retourna chez lui en profonde réflexion. La nuit portant conseil, Mario décida de prendre une journée de congé pour mieux se rabattre sur ce pleutre cabochard de veau. Il fallait vraiment prendre le taureau par les cornes si on peut dire. Mario n'étant pas nécessairement du genre patient, il échafauda un plan machiavélique après avoir entendu une publicité sur Nez Rouge. Il s'empara d'une couple de bouteilles de bière et, rendu dans l'enclos, les vida dans le plat de moulée pour en faire un cocktail alléchant mais surtout enivrant pour le veau. S'étant placé en mode attente, Mario vit enfin le veau se mettre à table et avaler gloutonnement sa moulée houblonnée. Le résultat fut rapide et spectaculaire. Sous l'effet de l'alcool, le veau perdit ses réflexes et ses peurs furent certainement inhibées, ce qui laissa tout le temps à notre cowboy, version 2009, de le remettre à sa place dans le corral. À part un éventuel mal de bloc bovin, il s'agit d'une méthode de capture très originale et vachement efficace.
On ignore pour le moment si Donald a hérité de la facture de bière et des bouteilles vides.