David Leblanc : Quand l'enseignement nous porte jusqu'en Nouvelle-Calédonie (Première partie)
En janvier dernier, David LeBlanc a laissé parents, amis, maison et loisirs pour aller vivre une expérience de travail hors du commun en Nouvelle-Calédonie: l'enseignement. Vous le connaissez probablement pour sa participation à plusieurs productions de Québecissime dont Décembre.
C'est par le biais du Cégep de Jonquière, qu'il s'est retrouvé à aller enseigner dans la ville de Koné pour former les futurs opérateurs locaux d'une nouvelle usine métallurgique de nickel. Il enseigne, par période de 10 semaines, à un groupe de futurs employés le procédé global de l'usine de nickel, l'économie du nickel dans le monde et il les conscientise aux impacts environnementaux liés à l'exploitation du minerai, à sa transformation mais aussi dus à l'arrivée progressive du mode de vie occidental.
C'est la division nickel de la compagnie Xtrata (ancien groupe canadien Falconbridge acheté par la compagnie suisse en 2004) qui est venu chercher des ressources francophones dans le domaine métallurgique pour enseigner aux calédoniens. Sur les photos 1-2 vous pouvez voir un des groupes d'étudiants de David en train de visiter une partie de l'usine.
Un peu de géographie et d'histoire
Située dans le pacifique sud, à 1 500 km à l'est de l'Australie et 2 000 km au Nord de la Nouvelle-Zélande, l'île de la Nouvelle-Calédonie fut déclarée comme colonie française en 1853. Elle s'étire du nord-ouest au sud-est sur près de 400 km en longueur et 50 à 70 km en largeur. Sur la photo 3 vous pouvez voir une partie de l'île vue de l'avion, photo prise par David lors de son retour en juillet dernier.
La ville de Koné fait partie de la province Nord de la Nouvelle-Calédonie et est située sur la côte ouest de l'île. La population y était de 5199 en 2009 et 78% vivaient dans un mode de vie traditionnelle. Elle forme avec les communes de Voh et Pouembout, le nouveau pôle urbain du nord de la province, soit la zone V-K-P.
Le taux de chômage y est élevé, car la plupart des habitants n'exercent pas d'activités professionnelles à proprement parler, mais participent aux tâches de la tribu parmi lesquelles la culture vivrière traditionnelle de l'igname et du taro. Koné est composée de 9 tribus qui ont été essentiellement créés avec un statut de réserve pour permettre l'exploitation du nickel et l'installation des colons européens vers les années 1860.
Un projet immense
La construction de l'usine de traitement de nickel du Nord qui est installée au pied du massif de Koniambo, est la quatrième usine métallurgique sur l'île de la Nouvelle-Calédonie. Elle fera l'extraction et la transformation du nickel. Pour les habitants de ce pays, cela représente le principal moteur économique et la principale source d'emploi. Cet endroit est riche de ce minerai, car comme me l'explique bien David, le mouvement des plaques tectoniques associé aux zones volcaniques a fait remonter la plaque océanique sur la Nouvelle-Calédonie, offrant ainsi des massifs aux sols riches en fer et nickel. Avec le climat chaud et la pluie, le sol s'altère et s'oxyde donnant une latérite de couleur rouille-orangée riche en oxyde de nickel et de fer.
L'usine va donc extraire en surface le sol, entre 10 à 40 m, pour y récupérer ses précieux éléments. Le matériel est ensuite concassé, puis transporté par un convoyeur de 14 kilomètres de long pour le rendre à l'usine. Sur les photos 4 et 5 prises par David, on peut voir le convoyeur qui descend de la montagne et une partie de l'usine en construction.
David m'explique que par la suite, le minerai est réduit en poussière, séché pour enlever l'eau et puis calciné. La transformation se poursuit par une réduction et une fusion pour terminer avec un ferronickel sous forme de grenailles composées de fer (65%) et nickel (35%). C'est ce produit qui sera ensuite vendu et exporté pour créer de l'acier inoxydable (stainless) que l'on retrouve dans une multitude de produits qui meublent notre quotidien.
Pour me donner une idée sommaire de l'immensité de ce projet, David me mentionne que c'est comme si on mettait ensemble une usine métallurgique de transformation comme Rio Tinto-Alcan avec une usine minière d'extraction comme Niobec. C'est gros en … dit-il avec expression.
L'influence occidentale et ses défis
Pour la Nouvelle-Calédonie, l'exploitation du nickel est le moyen d'inscrire le pays dans le mode de consommation occidental. Mais pour les habitants, il ne s'agit pas d'une nécessité, car ils ont tout ce qu'il faut pour vivre. C'est après la deuxième guerre que l'exploitation de « l'or vert » s'est accrue et que la Nouvelle-Calédonie est devenue le troisième producteur mondial de nickel.
Ainsi les habitants de la Nouvelle-Calédonie délaissent graduellement leurs terres et leur mode de vie tribale pour venir travailler dans ces usines et adhèrent ainsi à un mode de vie plus occidentale. Mais ces changements de mode de vie amènent de nouveaux défis, soit: la conscientisation aux impacts environnementaux d'un tel mode de vie dont, entre autre, la gestion des déchets.
Comme me l'explique David de façon imagé, ces gens qui avant buvaient dans des tasses fabriquées en argile ou en bois, utilisent désormais de nouvelles matières non dégradables telles que les plastiques, les canettes d'aluminium et le styromousse en quantité grandissante. Or, sur l'île, la gestion des déchets se fait encore comme nous le faisions il y a quelques décennies, à savoir des dépotoirs à ciel ouvert! Et pour eux la méthode la plus simple pour les réduire, consiste à mettre le feu dedans. Vous pouvez imaginez les fumées nocives et la perte nette de matériaux pouvant être revalorisés…
La Nouvelle-Calédonie et ses habitants doivent donc apprendre à mieux gérer leurs déchets et à implanter des systèmes de récupération et de recyclage, car sur une île, l'espace est vite restreint et l'exportation des déchets peu populaire et coûteuse.
La suite de cette pasionnante aventure dans la prochaine édition.