À notre dernière rencontre de l'Aféas, qui a eu lieu le 7 avril 2013 et afin de souligner les 42 ans du sinistre de St-Jean-Vianney, il a été décidé qu'un ménage soit fait autour du monument qui a été érigé pour les habitants de St-Jean-Vianney. Des jeunes parents avec leurs enfants ont participé à cette activité; merci à vous tous. Une cérémonie a eu lieu le 4 mai 2013 afin de rendre hommage aux anciens résidents de St-Jean-Vianney ainsi qu'à toutes les personnes qui sont décédées durant ce sinistre. Des oiseaux, fabriqués par des élèves de Lisa Claveau de l'école Notre-Dame-Du-Sourire, ont été déposés devant le monument. Ce geste symbolique rappelle la phrase gravée dans la pierre du monument :
«On devrait être comme l'oiseau qui vole bien haut et qui passe
au-dessus du malheur pour rebâtir son nid ailleurs».
Pour parler de la vie avant le sinistre, j'ai pensé donner la parole à un ancien résident de St-Jean-Vianney, Michel Blackburn, auteur des volumes : «Enfants d'un royaume (récit)» ainsi que «Par-delà ma vie». Celui-ci est né en 1942, à St-Jean-Vianney, marié, père de trois enfants et 6 petits-enfants. Celui-ci encourage des nouveaux auteurs à parler de la vie de St-Jean-Vianney avant le sinistre.
En passant j'ai lu « Enfants d'un Royaume »; il y a des passages qui sont touchants, d'autres ont réussi à me faire rire avec des anecdotes qui nous font vivre des bons moments de plaisir à travers les personnages. Merci Michel d'avoir accepté de nous confier une partie de ton enfance.
Naissance d'un village
La revanche des berceaux battait son plein dans la « province de Québec » et on venait à peine de se relever des ravages causés par la « grande dépression ». C'est dans ce contexte difficile que nos pionniers ont décidé de fonder le Village de Saint-Jean-Vianney de Shipshaw. Comme il se devait, il fallait commencer par construire l'église. Toutes les forces vives se sont liées pour mener à bien ce défi de taille. Ce fut un succès et finalement, en plus d'avoir un endroit pour le culte et les rencontres, la sacristie et le sous-sol pouvaient servir de salles de classe en attendant la construction du couvent qu'on avait prévue en face de l'église.
JANOUK ET MOI
Ce fameux couvent était encore tout chaud, comme une miche de pain qu'on vient de sortir du four, lorsque Janouk Murdock et moi l'avons fréquenté pour la première fois. Suivis par de nombreux autres enfants, nous remplissions les quatre classes. Il était déjà trop petit. C'est dans ces murs et dans cet environnement serein que nous avons découvert notre monde, un monde somme toute relativement riche si l'on considère la période. Dans un premier temps, la compagnie Price Brothers avait donné une première impulsion en fournissant du travail aux pionniers. L'usine d'Arvida a aussi contribué à notre bien-être matériel. Sans oublier bien sûr, l'apport non négligeable des fermes laitières.
Janouk Murdoch a dû quitter le village en 1952, leur maison ayant été incendiée. Pour ma part, c'est en 1960 que j'ai quitté pour continuer mes études.
Plus de cinquante ans plus tard, nous avons repris contact, par Internet, et avons commencé à échanger mutuellement nos souvenirs de cette enfance choyée, que nous avions vécue. Nous avons, par la suite, décidé de compiler ces souvenirs et avons intitulé la publication: Enfants d'un Royaume. Nous avons réussi, selon les nombreux témoignages recueillis, à transmettre une ambiance, celle qui régnait dans notre village (aujourd'hui disparu) à l'époque de la «grande noirceur».
Ce fut un plaisir pour Janouk et moi de nous remémorer cette belle enfance dans le cocon de notre lieu de naissance. Cela nous a fait prendre conscience de la richesse que nous avions de vivre dans ce petit village en devenir.
LES ANNÉES '60
Et ce « devenir » il est arrivé après notre départ. En effet, de 1960 au jour fatidique du drame qui a marqué sa fin, notre village a explosé. Sous la gouverne d'une administration dynamique et ambitieuse, de nouvelles familles sont venues s'installer chez nous, ce qui a provoqué un dynamisme formidable. En pleine «révolution tranquille», notre village à changé de cap. Il est passé du froment au ciment. Les familles nouvellement arrivées se sont intégrées harmonieusement aux personnages que nous avons dépeints dans notre livre: Enfants d'un Royaume.
LA RELÈVE
Après coup, je réalise aujourd'hui, que le St-Jean Vianney de notre enfance n'était plus celui de «cette nouvelle génération» et de ces nouveaux arrivants. Il manque des pages à notre livre et nous ne pouvons pas les écrire, car nous n'étions plus là. Nous n'avons été que des témoins éloignés de cette belle dynamique qui s'est déployée après notre départ.
Mon plus grand souhait serait qu'une ou des personnes de la génération qui nous a suivis, transmettent aux générations futures, le récit de cette période effervescente, qui se vivait dans notre cher village aujourd'hui disparu. Englouti…
Michel Blackburn
En hommage à sa famille : René (son père),
Gracia Couillard, 98 ans (sa mère), Micheline, Denise, Julien, Nicole, Alain, Marie, Bernard, Suzanne (ses frères et sœurs).
Sur la photo: René Blackburn, Rolande et Gaspard Couillard.
La photo avait été prise à St-Jean-Vianney par Gracia Couillard qui a 98 ans aujourd'hui.