Le 27 July 2024
Volume 42, Numéro 6
Saviez-vous Que...

Clientèle captive

Quoi de plus naturel, quand on veut casser le rythme des longues heures au bureau devant l'ordinateur, que de dire à Richard : « À midi on va chez Tim Horton manger une p'tite soupe et siroter un bon café. » Comme Claire Duchesne ne met pas de sucre dans son café, le sirop vient plutôt des beignets. M'enfin! Et qui plus est, ce léger déplacement de quelques kilomètres permet également de sauter l'étape : « vaisselle à laver ».

Ceci étant, le repas une fois ingurgité, nos deux amis prirent des chemins différents: Richard vers la voiture, question de lancer les chevaux et Claire vers les toilettes, question de faire le vide mentalement. Comme on sait, à cet établissement de restauration rapide, la section «lieux d'aisances» se cache derrière une porte commune qui elle-même s'ouvre sur les cabinets « homme » et «femme».

S'étant engouffrée dans les latrines pour dame, Claire verrouille la porte et s'installe sur le trône. Pour elle, c'est devenue une seconde nature: à cause de sa profession d'infographiste elle aime bien travailler seule dans son «petit coin». Habituée de fixer un écran, cette fois elle doit se contenter de lire quelques insanités écrites au feutre sur la porte. Une fois les opérations terminées, Claire dans un mouvement presque réflexe, tourne le loquet qui barre la porte et s'élance presque pour ouvrir la porte, mais «zut» le loquet tourne à vide et le pivot qu'il devait entraîner maintient la porte barrée. Claire, d'abord surprise, garde un calme olympien. Elle reprend la manœuvre mais sans plus de résultat. Elle jauge maintenant l'espace sous la porte; il lui semble que la tête passerait mais pas les oreilles. «Merde, de merde

Elle se risque à vérifier, d'abord sur le ton de la confidence, puis à gorge déployée, si un bon samaritain occuperait les toilettes pour homme. Aucune réponse. Ça commence (ou plutôt ça continue) à sentir mauvais. Si au moins Richard l'avait accompagnée. C'est vrai qu'il s'agissait d'un urgent besoin d'être seule. «Parlant selles, Richard, mais oui, il a son cellulaire et moi aussi». Claire pitonne donc le numéro, mais il devient évident, après trois minutes de sonnerie, que son téléphone n'est pas ouvert et qu'il ne répondra pas à cet appel pourtant désespéré.

«Peut-être après une attente d'une heure daignera-t-il quitter le confort de son auto pour voler à mon secoursTorturée par ces pensées déprimantes, Claire décide alors de passer à l'action.

Sans doute inspirée par la façon dont la potion magique permet à Astérix et Obélix d'ouvrir les portes récalcitrantes, Claire se donne un élan, que nous qualifierons d'irrésistible, et fonce dans l'ennemi. La structure s'ébranle sous l'impact dans un grincement de tôle et laisse pivoter la porte, dont le verrou a rendu l'âme. Enfin libérée de sa cage, notre lionne, toutes griffes dehors et prête à en découdre avec Richard, se précipite vers la sortie, fonce vers la voiture son conjoint bienheureux, et inconscient du danger est sur le point de s'endormir.

La suite pourrait se résumer ainsi: «Mon amour, je n'ai pas eu le temps de me laver les mains. Pourrais-tu me ramener à la maison que je m'exécute. MERCI!

S'en suivi ce qu'on pourrait appeler en politique «le discours du trône ».

Pour faire suite à cette histoire drôle, voici une drôle d'histoire racontée par une outarde qui avait des amis à Shipshaw dont le soussigné, Benoit Girard.