#JeSuisLeMonde
Au moment d'écrire ces lignes, les attentats terroristes de Paris revendiqués par le groupe armé État islamique, qui avaient fait à cet instant 129 morts et 352 blessés, se sont passés il y a trois jours. Au moment où vous les lirez, quelques semaines se seront écoulées, mais les questions de l'intégration des migrants ou de la résolution de la crise au Moyen-Orient seront loin d'être résolues. Considérez cette chronique comme un instantané de mon opinion, pris alors que le débat fait rage.
Tout d'abord, je dois dire que plus je regarde les médias sociaux, moins je suis fière d'être Québécoise. Pétition contre l'accueil des 25 000 réfugiés syriens promis par le nouveau gouvernement de Justin Trudeau, banderoles haineuses dressées dans les rues, messages craintifs écrits dans un français hasardeux sur Facebook. S'il existait un filtre coloré à apposer par-dessus ma photo de profil pour me dissocier de ces propos, je le ferais.
Je m'exécuterais sur le champ, car je trouve hypocrites toutes les personnes qui ont adopté le drapeau français en soutien de la tragédie parisienne, pour ensuite refuser d'accueillir des personnes dans la misère à force de vivre chaque jour dans leur pays des drames violents causés par des terroristes haineux. Mais ça, c'est comme la famine en Afrique, on n'y pense pas et on continue de vivre comme si tout allait bien dans notre paisible bulle québécoise de champs, de lacs et de conifères.
Oui, la question de la sécurité est légitime. Il ne fallait pas se la poser le 13 novembre, quand les kamikazes se sont fait exploser après avoir fusillé des innocents. Elle était d'actualité dès que les mesures fédérales ont été proposées. Et si les politiciens prenaient leur rôle plus au sérieux envers la population pour l'éduquer et la rassurer, au lieu de s'obstiner sur la place publique, ils perdraient beaucoup moins de temps pour travailler à assurer notre sécurité.
J'ai bien plus peur des Canadiens nés ici, qui se sentent abandonnés et qui se radicalisent sur le web pour ensuite perpétrer des attentats comme celui du 22 octobre 2014 au Parlement, à Ottawa. Selon l'Agence France-Presse, le Canada a accueilli 263 000 réfugiés entre 2005 et 2014. Aucun n'a commis d'acte terroriste.
C'est drôle, parce que j'ai rencontré des Français d'origine ici qui, malgré la peine qui les afflige, n'ont pas entré dans le jeu des djihadistes en cédant à la peur. «Tout musulman ou toute personne venant du Proche-Orient n'est pas nécessairement un terroriste ou un fanatique, plusieurs ne demandent qu'à vivre en paix » m'a déclaré au téléphone le consul honoraire de la France dans la région, le Dr François Brochet. « Je ne crois pas que fermer les frontières soit une solution. Les réfugiés fuient des évènements comme Paris, ce n'est juste pas autant médiatisé », insiste l'étudiant français Robin Tranchant.
Comme individu, il est très difficile de changer le monde. Comme nation, nous avons l'opportunité d'y apporter un peu de lumière, en ouvrant notre porte à des gens qui n'ont plus rien. À l'approche du Temps des fêtes, je me sentirais égoïste de manquer cette chance. Pour une fois, nous offririons un cadeau qui a du sens, plutôt qu'une console de jeux vidéo. Ces mêmes jeux qui banalisent la violence, celle qui nous a tellement touchés lorsque l'on a regardé les nouvelles lors du dernier vendredi 13.