Martin Boudreault, un homme aux multiples passe-temps
Passer le temps: s'occuper, trouver une activité, souvent pour ne pas s'ennuyer.
Au mois de septembre dernier, je suis allée rencontrer Martin Boudreault qui demeure à Shipshaw afin de rédiger un article sur la fabrication de ses sculptures.
Martin Boudreault a commencé à sculpter il y a environ 40 ans alors qu'il demeurait à St-Nazaire. A son arrivée à Shipshaw, il a participé à différentes activités hivernales qui lui ont permis de faire la démonstration de son talent de sculpteur sur glace. Il a fabriqué 33 sculptures dont trois ont obtenu un prix pour les plus beaux ouvrages sur glace.
Son intérêt ne s'arrête pas là; depuis environ trente ans, il transforme le bois qu'il bûche lui-même pour en faire des meubles sculptés. En 1980, il a été recencé le plus jeune artiste du Québec avec ses 230 sculptures. Sa production artistique a inspiré un livre intitulé ''Pour passer le temps''.
En 1988, il a représenté le 150e anniversaire de la Ville de Jonquière en sculptant un bûcheron assis sur une souche. Cette sculpture était un hommage aux premiers colons qui ont bûché les immenses pins de la région en 1888 pour fabriquer des mâts, ces longues pièces de bois qui portent les voiles d'un navire.
Quand je suis entrée dans sa maison, j'ai vite réalisé que le verbe s'ennuyer ne faisait pas partie du vocabulaire de Martin Boudreault. Sculptures, tableaux peints à la main, animaux naturalisés occupent un espace de choix dans les différentes pièces de la maison.
A l'étage, on peut distinguer plusieurs petits objets, des oiseaux entre autres, soigneusement sculptés à la main dans du bois et du granit et qui ornent chacune des pièces. Sur les murs, il a peint avec minutie des tableaux décrivant des scènes hivernales qui nous racontent une histoire.
Au sous-sol, on peut admirer entre autres des têtes de chevreuils, une tête d'orignal, qu'il a naturalisé dans le plus grand respect de la nature. Grand amateur de chasse, depuis plusieurs années il rencontre des élèves dans les écoles. C'est sa manière de leur transmettre son amour de la forêt et de les sensibiliser au respect du cycle de la vie des animaux. C'est surtout pour leur faire prendre conscience de la grande richesse que la nature leur procure.
Un tableau attire l'attention; il s'agit de la chute Ouiatchouan du village de Val-Jalbert. Peintre autodidacte, il a créé ce premier tableau en 1972 qui décrit fidèlement les écumes blanches de cette gigantesque chute.
Ses objets d'art, il les remet en cadeau à ses enfants et ses petits-enfants. Chaque objet a une signification bien particulière; c'est un rappel du temps qui passe qu'il faut saisir à chaque instant.
Ses voyages sont aussi une occasion de s'adonner à une autre forme de sculpture: façonner des animaux dans du sable. C'est une technique très différente de la sculpture sur bois. Elle exige une dextérité manuelle très particulière; ''c'est comme sculpter dans du savon''. Sculptures de dragon, dauphin et tortue ornent les plages ensoleillées des mers du sud au plus grand plaisir des touristes.
C'est à l'extérieur de la maison que l'on remarque ce gigantesque totem qui attire les regards à l'entrée de sa maison. Il a fallu 600 heures de travail pour sculpter cette gigantesque pièce de bois avec deux petits couteaux et beaucoup de patience. Dans la partie supérieure du totem, il a taillé le Dieu de la pêche, au milieu, le Dieu des minerais et dans la partie inférieure, le Dieu de la chasse. Au total, Martin Boudreault aura sculpté trois totems qui, chacun, rappellent une histoire différente.
Travailler le bois pour en produire une pièce unique, peindre un tableau qui raconte un récit, chasser dans le respect du cycle de la vie des animaux, c'est une manière de passer le temps, de laisser une trace dans la mémoire de ses enfants et ses petits-enfants et surtout de ne jamais s'ennuyer.
Si vous demandez à Martin Boudreault comment sculpter une vague dans le dos d'un dauphin il vous répondra que c'est un secret bien gardé!
Marlène