L’amour et les milléniaux
Ma cousine de 19 ans est avec son chum depuis cinq Noël. Ils se sont rencontrés juste avant le magasinage des fêtes et ils ne se quittent plus depuis. Ça lui évite d'avoir à nous présenter chaque année un nouveau gars au souper du réveillon. Nos matantes pensent toujours qu'elle est une exception, que la plupart des jeunes gens de notre âge sont comme des girouettes en amour et qu'on change de partenaire comme on change de bas. Eh bien, ce n'est pas le vrai!
On observe des changements radicaux avec la génération des «milléniaux», des jeunes de 12 à 27 ans dont je fais partie. Nous pensons, agissons et évoluons différemment. En amour, une étude américaine démontre que les «milléniaux» ont moins de partenaires amoureux différents et qu'ils semblent demeurer avec la même personne plus longtemps.
L'étude ne fait que constater la tendance, mais on peut croire qu'elle est probablement due au contexte dans lequel nous avons grandi. Beaucoup de jeunes de ma génération ont vécu le drame du divorce entre papa et maman. Nous ne pouvions pas juger de ce qui se passait, mais c'était difficile de voir nos modèles refuser de faire les concessions qui permettent la vie en couple. Nous en avons peut-être retenu certaines leçons. Lorsque je regarde autour de moi, c'est beaucoup de couples de longue date que je vois. Pas nécessairement que des histoires d'amour à la Roméo et Juliette, mais des gens qui croient, à tort ou à raison, que l'amour est quelque chose de trop important pour le négliger. On n'a pas trouvé de recette secrète, la vie de couple demeure toujours un dilemme entre le plaisir de vivre avec l'être aimé et le défi de faire, jour après jour, de petits (et des gros) compromis. Mais c'est surtout une prise de conscience que j'observe, une volonté d'entretenir de perdurer avec la même personne. Peut-être qu'en voyant nos parents vivre chacun de leur côté, on se dit qu'on ne veut jamais finir tout seul dans une grande maison vide.
On veut peut être rester en couple avec la même personne longtemps, n'allez pas penser qu'on va se marier. D'abord, on n'a pas l'argent et on l'aura probablement jamais. On préfère dépenser pour vivre des expériences: pour le prix d'un mariage; on va plutôt partir en voyage. Et puis, c'est bien beau se marier, mais au nom de quoi? Nous sommes athées pour la plupart d'entre nous. Pour nous, l'Église est aussi vide de sens que de fidèles. Ça n'empêche pas qu'on peut avoir des valeurs qui en sont issues, seulement que rien ne nous encourage à y célébrer un élément marquant de notre vie.
Je vous entends déjà crier les jeunes ne sont pas tous comme je le décris et qu'il en a des «girouettes amoureuses». Assurément qu'il en a, comme il en a eu dans toutes les générations. Ce qui est plus nouveau, c'est que la culture populaire les valorise, mais ça demeure un mode de vie de cinéma, rien de réaliste. Il n'y a pas de films sur ceux qui veulent mener une petite vie tranquille, on en parle pas dans les médias. Mais je vous le dit, on est pas mal plus nombreux que vous pouvez le penser. Je crois ma génération a assez de recul pour voir que l'individualisme n'a pas mené les gens au bonheur. Pourquoi ne pas essayer autre chose ?