Le 26 décembre 2024
Volume 42, Numéro 10
Opinion

Politique étrangère

Chapeau au Président Donald Trump pour nous avoir si bien divertis tout au long de l'été! 

Trump, s'il s'est montré incapable de remplir ses promesses électorales les plus élémentaires (malgré une franche volonté qui n'est pas partagée par tous nos politiciens), a complètement transformé le show politique. La réalité rejoint la fiction et la dépasse par moment.

La tentation est forte de remercier le président américain Donald Trump pour avoir fourni du matériel fort divertissant aux médias du monde entier tout au long de l'été alors que la vie politique provinciale et nationale était au point mort. Quoi de plus efficace que la menace d'une guerre nucléaire pour capter l'attention! 

Bien sûr, cela ne s'est pas fait sans quelques anicroches. Une bonne partie des citoyens américains craignent chaque jour un affrontement nucléaire avec la Corée du Nord. Certains médias se sont même (re)mis à enseigner les méthodes de survie en cas de bombardement ennemi, comme dans les moments les plus chauds de la guerre froide. 

Trump a eu la tâche ardue d'avoir l'air en beau joualvert à l'encontre du dirigeant nord-coréen Kim Jong Un, alors qu'au contraire, il vit probablement l'un des plus beaux moments de sa présidence, et cela vaut également du côté nord-coréen. Malgré l'image d'un homme impulsif qui se «fit davantage à son instinct qu'à ses conseillers», Donald Trump est, à mon sens, un président beaucoup plus réfléchi que ses prédécesseurs. Non pas au niveau de la stratégie politique et encore moins en ce qui concerne la politique étrangère, mais plutôt avec sa compréhension aigüe des aléas de l'opinion publique et des multiples astuces pour la manipuler à sa guise. C'est avant tout un homme qui a appris à avoir l'air, plutôt qu'à agir véritablement.

Les chefs d'état nord-coréen et américain vivent de très beaux moments puisqu'ils apparaissent tous les deux comme des dirigeants puissants aux yeux de leur peuple. Trump peut insulter allégrement le leader d'un pays détesté par une grande partie du monde occidental, chose que son prédécesseur Obama, ni aucun autre président, n'a pu faire. C'est un peu la même situation du côté nord-coréen puisque menacer la première puissance militaire est perçu comme une grande preuve de courage et pas seulement en Corée du Nord. Ce n'est pas impossible que Kim s'en sorte gagnant sur la scène internationale. C'est un peu le match des étoiles de la Ligue de Baseball Majeur : tout le monde frappe des coups de circuits, sauf que c'est une partie hors-concours. 

Il m'apparait claire que les États-Unis ne peuvent aucunement attaquer la Corée du Nord. Non pas parce que le pays représente une réelle menace militaire, mais parce que la gouvernance américaine n'a nul envie de devoir organiser l'après-communisme en Corée du Nord comme cela a du se faire à la suite de la reddition du Japon en 1945. 

Kim Jong Un n'est pas non plus un dirigeant fou, comme plusieurs se plaisent à l'avancer. Il a été longuement formé par son père et sa famille pour suivre le model de gouvernance familial, dictatorial soit, mais qui a permis au régime le plus isolé au monde de survivre depuis plus de soixante-dix ans. Il n'a aucunement l'intention d'attaquer les États-Unis outre que verbalement. La Corée serait littéralement anéantie en quelques heures dans le cas contraire. Il se retrouve cependant dans une impasse dont il sera difficile de s'échapper. Le pays se distance progressivement de ses deux (seuls) alliés -la Russie et la Chine- essentiels à sa survie économique. La Chine a d'ailleurs permis à l'ONU d'infliger de lourdes sanctions économiques sur les exportations nord-coréennes qui devraient priver le pays d'un milliard US par année, soit grosso modo 6% du PIB. 

La Corée du Nord a beau être une dictature, de telles sanctions ne passeront pas comme dans du beurre si la population est privée des quelques ressources auxquelles elle a accès. D'autant plus que les Américains espèrent depuis longtemps déstabiliser le pays de l'intérieur en encourageant la dissidence. Kim Jong Un mise probablement sur son hypothétique pouvoir de frappe pour faire reculer les sanctions qui pèsent sur son pays et ainsi échapper au sort funestes des dictatures comme la Libye ou encore l'Iraq. 

Il y a fort à parier que l'été 2017 ne se terminera PAS en averse atomique.