La p'tite école... suite...
Ceux parmi vous qui ont lu ma chronique d'octobre ont été à même de constater l'immense contraste entre l'école d'aujourd'hui et celle d'autrefois qu'on appelait fort judicieusement la p'tite école et qu'on retrouvait dans tous les rangs du Québec.
Le lieu physique (voir photo)
Il s'agissait d'un bâtiment rustique d'une seule classe situé au milieu du rang. Comme les enfants voyageaient à pied beau temps mauvais temps et qu'il y avait seulement une maison par lot de terre, certains enfants pouvaient mettre une heure pour se rendre à l'école souvent nus pieds. Dans l'unique classe de l'école, qui cumulait les niveaux de 1ère à la septième année, s'entassaient de 30 à 35 enfants, âgés de 5 à 14 ans. En avant le bureau de la maitresse, un tableau noir, un globe terrestre, des chaises et plus rarement des pupitres pour les élèves. Les petits avaient les mêmes formats de chaises que les grands. En arrière, le poêle à bois, dehors une bécosse comblait les besoins sanitaires et une remise à bois complétait les commodités.
La maîtresse d'école
Les conditions d'admission à ce poste héroïque étaient fort simples: avoir entre 16 et 20 ans, ne pas être mariée et posséder un certificat de bonne conduite délivré par le curé de la paroisse. Elles logeaient pour la plupart chez l'habitant et devaient voyager à pied également. Le salaire en 1900 était de 105 $ par année. Elles étaient toutes congédiées à la fin de l'année scolaire et devaient garder de bonnes mœurs durant l'été pour être réengagées. Le curé les avait à l'œil.
La pédagogie
Comme enseigner à 7 niveaux différents en même temps, dans le même local peut s'avérer très complexe voire impossible, la maîtresse demandait aux plus vieux d'aider les plus jeunes. Dans ce contexte plus primitif que primaire, les élèves n'avaient pas de cahier, pas de crayon mais une ardoise de 8 X 12 pouces et une craie d'ardoise. Pour nettoyer cet ancêtre de la tablette électronique, on crachait légèrement dessus et on nettoyait avec le coude (chemise, gilet, veston).
Les devoirs se faisaient à la bonne franquette. Mon père Laurent qui a été seulement 3 ans à la p'tite école avait dû quitter, comme bien des fils de cultivateur, réquisitionnés pour les travaux de la ferme. À nous, ses enfants, il a essayé de nous faire coller que c'était parce qu'il en savait autant que la prof. mais il avait frappé un mur de scepticisme.
Évidemment la maîtresse avait en sa possession 2 éléments dissuasifs pour maintenir la discipline avec les malcommodes et les paresseux: à genoux dans le coin ou la bonne vieille "strappe" de cuir. Quelques bons coups sur les mains et le désir d'apprendre revenait au galop.
C'était plus difficile par ailleurs avec les plus vieux qui pouvaient être presque du même âge que leur enseignante. Certains en tombaient même amoureux.
L'hiver
D'abord il faut dire que les chemins de campagne, pour la plupart, n'étaient pas entretenus l'hiver. Les chevaux et traîneaux tapaient la neige au fur et à mesure que s'étirait la saison froide. Les enfants qui marchaient vers l'école lors d'une tempête, avançaient péniblement, ralentis par la neige, le vent et les grands froids. D'ailleurs les vêtements de l'époque manquaient cruellement de confort. Surtout chez les filles qui se voyaient interdit de porter des pantalons. Ma mère a toujours eu cette injustice sur le cœur, même à un âge avancé; petite fille, elle se rendait à l'école en jupe et bas longs. C'était pas chaud.
Le poêle à bois
Unique système de chauffage, il devait être allumé le matin et la maîtresse nommait un élève responsable de l'entretenir durant la journée. Par très grands froids, alors que la classe n'était pas suffisamment réchauffée, la prof. demandait aux élèves de garder leur manteau, tuque et mitaines et même de commencer la journée regroupés autour du poêle.
Les résultats
Bien que l'instruction ne fut pas obligatoire au Québec avant le début des années 1960, les écoles de rang ont quand même montré à lire, à écrire et à compter à des générations de jeunes. Leur utilité, leur proximité, leur simplicité dans un contexte très difficile ont été reconnues.
La meilleure
À une certaine époque, dans beaucoup de paroisses, les résultats scolaires de fin d'année des enfants étaient annoncés publiquement à l'église, à la grand-messe du dimanche. Le curé, du haut de la chaire, annonçait à ses ouailles tous les résultats des élèves. Bons ou mauvais. Ayoie!
On repassera pour la discrétion mais on sauvait du papier
Pensée d'automne, lue dans la revue "le lien" mais d'auteur inconnu:
"Un des aspects les plus touchants de notre Mère Nature est cette façon qu'elle a de rougir avant de se dévêtir".