Le 22 décembre 2024
Volume 42, Numéro 10
Opinion

Pourquoi je ne veux pas le 500$ du gouvernement

La gêne totale. Dans une file à l'épicerie au centre-ville de Chicoutimi. Tout le monde avait déjà attendu plus que sa patience le permettait. Moi, l'opportuniste qui voulait faire vérifier mon billet de loto en plus de payer mes trucs. Dring, dring, dring : l'alarme de la machine vérificatrice qui se fait entendre très fort. J'avais gagné à la loto. 

Plus exactement, j'avais 5 sur 6 au Québec 49, soit pas grand-chose : 750 $. Un chiffre de plus et je devenais millionnaire. Mais tout de même, j'ai devais me rendre à Québec pour réclamer mon «gros lot». 

Sur place, on a la gentillesse de vous demander si vous préférez avoir un chèque ou des jetons à jouer dans les machines à sous de l'état. J'ai évidemment choisi la première option en me demandant combien de personnes avaient préféré tenter leur chance et étaient reparties avec moins d'argent dans les poches.  

Pour l'utilisation détaillée de mon magot, la voici : Passage à la caisse populaire pour déposer mon chèque, arrêt au restaurant cubain sur Saint-Joseph, remplissage de ma voiture en essence avant de reprendre le Parc et retour à la maison. Le lendemain, j'ai payé ce que je devais sur ma carte de crédit, j'ai fait une bonne épicerie et il me restait quelque chose comme 80 $ qui m'a permis d'être un peu moins cassé après avoir payé mon loyer. Et voilà! 

Investir 

Lorsque le gouvernement provincial a annoncé qu'il donnerait 500 $ à pratiquement tous les adultes pour se faire réélire pour pallier l'inflation, j'ai eu l'impression de revivre l'épisode de mon ''gros lot''. 

Je n'en veux pas du 500 $ du gouvernement. Pourquoi? Je n'ai pas les compétences pour gérer tout cet argent! Sans blague, qu'est-ce que la majorité des Québécois vont en faire? Payer cash certaines dépenses essentielles pour la plupart, payer un versement à l'avance pour les plus responsables et s'acheter un jouet quelconque pour les moins responsables. 

La plupart d'entre nous ne savons pas comment faire bonifier notre argent, encore moins comment faire face à l'inflation. Heureusement, il y a des gens qui étudient l'économie et la finance et d'autres personnes qu'on élit pour prendre des décisions judicieuses pour l'économie. 

Ces gens, le gouvernement (et ceci est vrai pour tous les paliers de gouvernement) a aussi la capacité de faire bonifier notre argent par la mise en place de services publics et même par la finance (par exemple la Caisse de dépôt et placement du Québec). 

Si vous le voulez bien, nous allons faire un petit exercice mathématique avec l'exemple suivant.

Plutôt que de donner 500 $ à presque tout le monde, le gouvernement provincial mise sur un nouveau programme de bourse pour les étudiants. 

Un étudiant reçoit 500 $, en plus des prêts et bourses et cet argent lui permettra de trouver un emploi plus payant. L'argent lui enlèvera un stress financier et lui permettra de ne pas avoir d'emploi à temps partiel et d'avoir plus de temps et d'énergie pour les études. 

Imaginons que plutôt que de trouver un emploi qui lui remporterait le salaire médian québécois (47 500 $ brute annuellement), l'étudiant sorte de l'école avec un diplôme qui lui permettra de gagner 100 000 $ par année en moyenne durant sa carrière.

Roulement de tambour… 

Cet investissement rapporterait 9 445 $ en impôts supplémentaires à l'état québécois chaque année. S'ajoutent à cela les taxes supplémentaires perçues parce que le travailleur a plus d'argent en poche et les impôts fédérales qui reviennent au Québec par le biais de la péréquation. 

Admettons que le travailleur travaillera 30 ans et que son salaire de 100 000 $ suivra l'inflation : le 500 $ de départ deviendrait plus de 2800 $, soit un taux de rendement de près de 7% par année. 

Rendre les armes 

Ce qui est inquiétant dans ce Nouveau crédit d'impôt pour pallier la hausse du coût de la vie qui nous apportera à tous un beau 500 $, c'est justement que cette somme est présentée comme une solution à la hausse du coût de la vie. 

S'il est vrai qu'au niveau provincial le gouvernement n'a que très peu de ressort pour s'attaquer à la hausse du prix de l'essence qui représente une grosse partie de cette hausse du coût de la vie, il y a mille autres points sur lesquels agir: transport en commun, alimentation, coût de loyers, etc. 

C'est en quelque sorte de s'avouer vaincu, de rendre les armes en donnant simplement 500 $ aux citoyens sans trouver de solution constructive pour éviter que la majorité de la population s'appauvrisse et qu'ils soient à la merci de tous les bouleversements économiques à venir.