Madame Rita, c'est comme ça que je l'appelais quand elle était avec nous à l'Afeas. Elle a été présidente en 2012. En 2006, ma sœur Lise m'a demandé d'entrer dans cette belle association «Afeas»; elle était secrétaire du mouvement à ce moment-là. Faire partie d'une association avec ma sœur m'enchantait beaucoup surtout que c'était pour apprendre à tisser au métier, ce que notre mère avait appris par elle-même. Malheureusement ma sœur est décédée un an plus tard d'un cancer et nous n'avons pas eu le temps de travailler ensemble. Ma sœur avait commencé une nappe et madame Rita l'avait terminée pour elle afin de la remettre à son mari Jean-Guy; une grande générosité de sa part.
Je n'ai pas abandonné l'association puisque j'avais Rita qui m'incitait à m'impliquer. J'ai assisté à plusieurs rencontres locales avec elle, j'apprenais aussi qu'il n'y avait pas seulement le tissage, mais nous pouvions nous impliquer socialement. On m'a proposé d'être trésorière pour l'exécutif. J'ai appris beaucoup à ses côtés. C'était une personne qui pouvait donner l'impression qu'elle était froide et réservée, mais ce n'était pas le cas. J'ai appris à la connaître; elle donnait de son temps pour aider les nouvelles recrues. Apprendre à tisser c'est tout un monde, mais apprendre à monter un métier, c'est un art qu'elle possédait et partageait.
En 2011, je l'informe de mon projet de faire œuvre de mémoire sur la tragédie de St-Jean-Vianney. Sa réaction a été encourageante, «vas-y, je te laisse faire». Je lui réponds : «OK, mais ce serait intéressant de le soumettre à un prix provincial»; il n'y avait jamais de problème, elle nous faisait entièrement confiance. Durant son mandat, l'Afeas de St-Jean-Vianney a gagné le prix provincial Azilda Marchand récompensant le meilleur projet d'implication sociale.
En quittant la présidence en 2012, elle n'a pas arrêté de nous enseigner les rouages du métier; c'est un travail de bras, c'est le cas de le dire.
Voici une petite anecdote que nous avons vécue Marlène, ma belle-sœur, et moi. Disons que le montage des métiers ce n'est pas notre tasse de thé. Une bonne journée, nous étions en train de réparer un métier qui avait mal été monté et voilà que la misère se met de la partie. Marlène: «On appelle madame Rita», Moi : «Ok j'appelle, madame Rita pouvez-vous venir nous aider ça va pas du tout ?» madame Rita: «Je viens de commencer à laver mon four.» Moi: «pas grave, on va le laver votre four». Madame Rita arrive illico presto pour nous démêler dans nos fils. L'histoire ne dit pas si nous avions lavé son four et on ne vous dit pas comment on avait procédé pour démêler les fils, Marlène et moi. Madame Rita riait de tout son cœur (elle devait rire de nous autres je suppose).
Mais le plus drôle pour madame Rita, c'était de travailler avec sa sœur Françoise (les chanceuses). Quand nous arrivions à l'improviste, je ne sais pas qu'est-ce Françoise avait fait, mais madame Rita riait de tout ce que Françoise faisait ou ne faisait pas. C'était un vrai charme de les voir travailler ensemble.
Madame Rita, la dernière fois que je vous ai vue, c'était à l'hôpital de Jonquière. Vous avez été plusieurs années sans qu'on ait eu la chance de vous revoir, mais nos pensées étaient avec vous. Toutes les personnes qui ont appris de vos enseignements ne peuvent oublier votre très grande générosité à transmettre le patrimoine artisanal. Merci d'avoir été là pour nous durant toutes ces années. Les membres de l'Afeas sont très heureuses d'avoir partagé avec vous une partie de votre vie.
«Ce qui nous attache aux êtres ce sont ces mille racines, ces fils innombrables que sont les souvenirs.» Marcel Proust