Le 21 décembre 2024
Volume 42, Numéro 10
Saviez-vous Que...

Une teinte de nostalgie

Il y a 20 ans, en 2004, alors que ce siècle et millénaire avaient 4 ans, je prenais ma retraite de l'enseignement après 35 ans de passion et de bonheur avec des jeunes du secondaire. Ma phrase fétiche dans la classe : « Ici on s'amuse à réfléchir ». Ça devait être agréable puisque dans toute ma carrière, je n'ai manqué que 2 jours de classe. Ces derniers temps, on entend beaucoup parler des difficultés inhérentes à la profession. Je suis d'ailleurs très heureux que la nouvelle convention collective ait ravivé la flamme qui se faisait vacillante. Mais, nous parlons ici du plus beau métier du monde et voici ce que j'en disais à l'époque, avec une teinte de nostalgie. 

Enseigner, c'est laisser son empreinte sur l'argile d'un cerveau qui se construit.

Enseigner a des effets secondaires intéressants: entre autres, on a l'âge de nos élèves, intérieurement s'entend. (pas 100 ans)

On enseigne à un seul élève à la fois. Notre enseignement est toujours individualisé par chacun d'eux.

Durant toutes ces années, où la sagesse se veut pluie fine sur les germinations, j'ai enseigné à un élève de 13 ans, aux mille visages, plein d'espoir et de rêves, de doutes et d'enthousiasme.

Par rapport à ce que nous sommes, par rapport à notre respect des jeunes, par rapport à notre vérité profonde, nous donnons toujours le même cours.

L'enseignant c'est l'âme vibrante du troubadour qui porte les mots jusqu'à la mélodie et le poids des mots jusqu'au cœur.

Au livre de la vie où le temps court sur les lignes qu'on écrit, l'histoire s'est accomplie, prodigieuse et pleine, comme un chapitre qu'on termine. Comme une page qu'on commence.

Sur le calendrier des souvenirs coulent et s'entassent les secondes du temps qu'on a mis à être heureux.

Lapsus linguae (erreur de langage) (langue qui fourche en Québécois)

Se définit comme une faute commise en parlant et qui consiste à substituer au terme attendu un autre mot. Évidemment sans le vouloir. Exemple: ma tante Alice disait de la «brune» plutôt que «brume» ou encore de la «cortisane» au lieu de «cortisone». Entre Noël et le jour de l'an, «voilà-ti» pas que notre poissonnier se présente in extrémis pour une livraison de poulets de grain congelés que, par tradition, nous offrons à nos filles. Très chaleureux de nature et ami depuis au moins 50 ans, il parle d'abondance et offre avec ses vœux la liste de ses poissons et fruits de mer. Ainsi crevettes, pétoncles, dorés, aiglefins, morues, saumons défilent dans sa nomenclature.

Puis la conversation dévie sur la santé qu'on se souhaite très bonne pour 2024. Sur ce, il me raconte qu'un de ses clients d'Alma s'était déboîté un genou en jouant de la PÉTONCLE. Mes rires spontanés et tordants l'ont surpris et stoppé dans son récit. Interloqué, il se demandait bien ce qui avait provoqué tant d'effusions joyeuses. Après avoir repris mes esprits, je lui signale qu'il a dit PÉTONCLE au lieu de PÉTANQUE dans son histoire. Il ne s'était pas rendu compte que le lapsus était particulièrement «savoureux», surtout venant d'un vendeur de poisson. Une fois revenu à la Pétanque, il a pu finir son histoire qui n'avait rien de drôle en soi.

Une graphie qui grafigne

C'est surtout l'opinion de Rolande sur sa propre écriture. J'ai beau lui dire que la première qualité d'une écriture manuscrite c'est d'être lisible, ce qui est le cas pour la sienne, pourtant elle s'autoflagelle à chaque fois en se convainquant que c'est mal écrit. À sa dernière expérience épistolaire, à son «j'écris mal», je lui réponds: «t'as juste à envoyer ta lettre à quelqu'un qui ne sait pas lire».