Le 21 janvier 2025
Volume 43, Numéro 1
La revanche des Sith
Opinion

La revanche des Sith

J'ai déjà hâte au Bye-Bye 2025. À vrai dire, j'ai rarement été aussi excité de savoir ce que l'année à venir nous réservera en matière de nouveautés et d'actualité qu'en ce début de 2025.

Commençons par les États-Unis, car c'est de là que risque de provenir certaines des plaies qui s'abattront sur le Canada dans les prochains mois. Le retour de Donald Trump à la présidence promet d'être plein de surprises, pour le meilleur et surtout le pire. Cette fois, cela risque d'être surtout le pire alors que le président élu parle de déportation massive des immigrants illégaux dans le pays, d'annexion du Canada et d'autres idées hallucinées de la sorte. La division de la société américaine s'est davantage creusée depuis son dernier mandat et, tout comme leur leader, une partie des Américains a perdu contact avec la réalité en s'abreuvant aux fake news et à la désinformation des réseaux sociaux. Surtout, Trump revient à la présidence entouré d'une bande de malfrats qui apparaissent chacun comme particulièrement inaptes à occuper leurs nouvelles fonctions et qui doivent tout (sauf peut-être Elon Musk) au 47e président américain. Ils feront preuve d'une loyauté absolue et il y aura cette fois encore moins de barrières pour freiner le délire du nouveau président. La revanche des Sith en quelque sorte en attendant le retour de la Force.

Envolons-nous vers le Moyen-Orient. Une toute nouvelle dynamique se dessine à l'est de la Méditerranée. Israël a passé plus d'un an à faire de la diplomatie au round-up ou, en d'autres termes, à démolir ses voisins belliqueux. De par le niveau de destruction, de victimes civiles et le manque de ciblage de ses frappes et interventions militaires, il est indéniable que les mouvements contre Israël renaîtront de plus bel dans quelques années, mais à très court terme, on risque de voir des changements importants s'opérer avec une région plus calme. Est-ce que Israël profitera du support de la nouvelle administration américaine pour annexer de nouveaux territoires palestiniens et, si oui, comment réagiront les pays arabes? Le Liban devrait avoir avoir une élection présidentielle en 2025 alors que le Hezbollah, véritable état qui a remplacé les institutions officielles depuis des décennies, a été en grande partie détruit par Israël au niveau matériel et humain et risque de ne pas pouvoir jouer un rôle central dans ces élections à venir.

Mais surtout la Syrie, qui vient de tourner la page d'un demi siècle de dictature avec la fuite de Bachar al-Assad il y a quelques semaines. La question qui se pose aujourd'hui est de savoir si le nouveau gouvernement, formé d'islamistes sunnites a priori modérés, maintiendra la position diplomatique de l'ancien régime en s'alignant sur les intérêts de l'Iran et de la Russie ou s'il s'en distancera. S'il rompt toute collaboration avec l'Iran, cela limitera grandement la capacité de reconstruction des milices fidèles à l'état chiite après leur destruction par Israël (Hezbollah, Hamas, etc) en maintenant plus longuement la paix dans la région. Le retour de milliers de ressortissants Syriens pourrait aussi avoir un impact dans les pays où ils s'étaient réfugiés, certains depuis plus d'une décennie. Le pays est à reconstruire et on peut penser que l'aide pour se faire sera disponible, provenant peut-être des pays du Golfe ou de l'Union Européenne. Probablement d'un peu tout le monde.

La question kurde, notamment celle du territoire contrôlé par les Forces Démocratiques Syriennes sera la plus complexe à régler. Pour les Occidentaux, il semble extrêmement difficile de soutenir le démantèlement des milices kurdes qui demeurent des alliés de premier plan dans cette région du monde, notamment dans la lutte contre l'État Islamique qui existe toujours sous la forme d'un mouvement de guérilla. La Syrie est toutefois d'une grande complexité ethnique et créer une région semi-autonome sous contrôle kurde, comme c'est le cas en Irak, n'est probablement pas la meilleure option. La Turquie bombarde et menace d'envahir le nord de la Syrie pour en chasser les combattants Kurdes et il reste à savoir si la diplomatie américaine arrivera à protéger ses alliés ou si ceux-ci seront sacrifiés au nom d'intérêts supérieurs.

Au Canada, le gouvernement de Justin Trudeau semble si fragile au moment d'écrire ces lignes avant Noël qu'il est hasardeux de trop s'avancer sur ce que l'avenir réservera. Si le premier ministre s'accroche au pouvoir, ses opposants au sein du parti Libéral feraient mieux de se réjouir. Peu importe quand aura lieu la prochaine élection fédérale, la victoire de Pierre Poilièvre est presque assurée. Si Trudeau se retire, il est probable qu'aucun candidat sérieux ne se présente à sa succession pour diriger les troupes libérales vers une défaite presque assurée. Pour le PLC, la meilleure avenue demeure d'aller jusqu'à l'abattoir électoral avec Justin Trudeau à leur tête et ensuite se lancer dans une course à la chefferie après son départ. Avec Trudeau qui demeure populaire auprès d'une certaine clientèle, peut-être pourront-ils sauver assez de circonscriptions (et avec la forte victoire du Bloc au Québec) pour empêcher les Conservateurs de remporter la majorité, bien que cela apparaisse comme peu probable au vu des derniers sondages.

Au Québec, le Parti québécois demeure premier dans les intentions de vote, mais avec une tendance qui semble à la baisse, à la faveur de la CAQ de François Legault. Si l'élection des Conservateurs à Ottawa plairait à François Legault, les sondages démontrent qu'il ne s'agira vraisemblablement pas du choix de la majorité des Québécois et l'insatisfaction face à qui gère le pays pourrait avoir un effet sur les partis indépendantistes. Dans les mois de fin d'année, le gouvernement semble avoir réussi à se sortir les pieds des plats, mais devra forcément replonger dans des dossiers complexes en 2025 qui affecteront, soit négativement ou positivement, l'impression des citoyens envers la CAQ pour les deux dernières années du mandat. Québec Solidaire peut difficilement connaître une pire année en 2025 qu'en 2024 et la remontée à laquelle on peut s'attendre, probablement au détriment du PQ, pourrait changer la donne dans l'écart qui sépare le PQ de la CAQ dans les intentions de vote.

2025 sera surtout une année électorale municipale avec les élections prévues le 2 novembre prochain. Pour qui prend la peine de s'y intéresser, la politique municipale est passionnante, reflète souvent davantage l'état de la société que les paliers supérieurs et surtout a un impact important sur la vie des citoyens. Depuis une dizaine d'années, chaque élection marque des changements importants dans la culture de la politique municipale au Québec. Plusieurs élus ont pris parole dans les dernières années pour dénoncer le climat toxique qui règne parfois au sein des conseils municipaux ou imposé par des citoyens agressifs. Il sera intéressant de voir quelle dynamique se mettra en place à suite à cette élection et comment celle-ci affectera les politiques provinciales et fédérales.