Le 26 mars 2025
Volume 43, Numéro 3
Le Destin du United States
Opinion

Le Destin du United States

À Destin, les responsables du projet prévoient faire couler le navire long de 300 mètres l'an prochain, après que celui-ci soit nettoyé de tout contaminant au courant des prochains mois. L'objectif de l'opération étant de créer un nouvel attrait touristique, tout comme l'est devenu le porte-avion Oriskany coulé il y a une vingtaine d'années, aussi en Floride. Dans le cas du United States, il faut dire que le navire était déjà livré à l'abandon depuis des décennies, malgré les efforts d'un organisme qui souhaitait le préserver.

Comme bien d'autres technologies de pointe des siècles précédents, le United States n'a pas trouvé sa place dans le monde moderne hyper rapide et hyper connecté. Un peu comme les coureurs olympiques d'il y a 100 ans dont les records de vitesses font pâle figure aujourd'hui, le transatlantique a été largement dépassé en vitesse par les avions modernes.

À plus de 60 km/h – ce qui est énorme pour la taille de la chaloupe – traverser l'Atlantique prenait un peu plus de 3 jours. Une dizaine d'heures de moins que ses compétiteurs… mais 3 jours de plus qu'un vol commercial!

S'il fallait verser des larmes à chaque fois qu'un tas de ferraille s'en va au dépotoir, on risquerait de faire monter les eaux beaucoup plus vite que la fonte des glaciers, mais là où il y a drame, c'est que dans sa catégorie, on n'a pas encore fait plus vite. C'est donc ce que l'humanité a, jusqu'à présent, fait de mieux en transport maritime longue distance de passagers qu'on coulera dans l'état de Donald Trump l'an prochain. Un peu comme si un projet consistait à dynamiter une pyramide égyptienne.

Voir tous ces gens qui se sont déplacés pour dire adieu au navire en février confirme qu'il y a un réel mouvement de nostalgie pour ces artefacts du siècle dernier. Malgré la rouille qui cache en parti son nom, on peut se reconnaître dans ce mastodonte qui peine à trouver sa place dans les temps modernes. Et à se promener sur la toile, on remarque la multiplication des mouvements nostalgiques de la sorte.

Parmi les plus intéressants et bien articulés, il y a les gens qui plaident pour le retour des dirigeables, disparus une quinzaine d'années avant la retraite du SS United States dans la première moitié du siècle précédent. Meilleure argument lu jusqu'à présent (provenant d'un universitaire de l'ouest canadien): la construction de route dans le nord du pays coûte près de 10 millions du kilomètre. Il serait moins dispendieux de construire et d'opérer des dirigeables… À méditer!

La nostalgie est d'ailleurs devenu le slogan officiel des États-Unis : Make America Great Again ou dans la langue de chez nous, rendre à l'Amérique sa grandeur. Si la formule sous- entend clairement que le passé était plus glorieux que le présent, ce n'est probablement pas en coulant – littéralement, rappelons-le – nos témoins historiques les plus importants qu'on le fera ressurgir.